Philippe Lacoue-Labarthe et Jean-Luc Nancy se livrent à un exercice revigorant sur
la politique et ses impasses. On y découvre toute une vision sans concession
sur l’exercice du pouvoir et ses
soubassements.
Philosophe,
professeur d'esthétique à l'université de Strasbourg, homme de théâtre et
germaniste français, Philippe Lacoue-Labarthe est mort le 28 janvier 2007 à
Paris, à l'âge de 67 ans. Avec Jean-Luc Nancy, il a signé de nombreux ouvrages
où il est question de philosophie, d’esthétiques et surtout une certaine
réflexion sur le monde actuel. Les deux dialogues publiés
ici ont pour sujet l'interrogation philosophique sur la politique. Déclinés à
travers une approche où la psychanalyse prédomine, pour Philippe
Lacoue-Labarthe et Jean-Luc Nancy, les maillages freudiens sur le pouvoir et l’autorité sont
scrutés à la loupe. Tout part de ce que les deux analystes appellent les conditions
de possibilité de l'existence collective. Autrement dit, la nécessité d’un pacte
pour que l’autorité siège là où elle n’est pas contestée ou alors, même dans la
contestation, on ressent ses bienfaits et son importance pour permettre au
monde d’être. C’est toute une plongée dans l’inconscient humain sur des
questions liées à la hiérarchie, à une force que l’on érige au-dessus de nous
pour en faire un idéal de vie en communauté. Dieu, l’Etat, le père, la mère, la
société, le peuple…
Dans cette configuration, la
question qui prévaut est celle relative à la légitimité de ce pouvoir qui doit
régir des vies. Comment le préserver ? Comment éviter son délitement ? Et surtout, quand tout
va mal, quand le socle sur lequel se construit ce même pacte entre pouvoir et
peuple, est branlant, comment ne
pas céder aux sirène de la panique ?
Ce qui est ici analysé et
approfondi par deux connaisseurs de la chose politique transcende le pouvoir
dans son sens primaire, pour se pencher sur d’autres manifestations de son
exercice. L’art et la culture, l’esthétique
en place, les tendances créatrices, un certain imaginaire collectif qui partent
de ce postulat de base qu’est l’idéal commun dans une société donnée.
Déclinée sous forme de discussion,
ce va-et-vient d’un point de vue à l’autre donne à ce texte une telle vitalité
actuelle qui peut se lire en rapport avec les crises qui se succèdent et
frappent le tissu des sociétés modernes partout dans le monde. Avec cette
justesse du regard, cette acuité à ne pas se focaliser sur un aspect en
ignorant ou omettant d’autres éclairages connexes. Le tout baigné par le
regret de savoir qu’à cette discussion manque la voix de Philippe
Lacoue-Laberthe mort depuis 2007.
Editions
Christian Bourgois.
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