vendredi 12 avril 2013

La contrebande a de beaux jours devant elle: 15 milliards dhs de manque à gagner pour le Maroc


La contrebande des marchandises en provenance d’Espagne a battu tous les records en 2012. C’est un marché  évalué à quelque 1,2 milliard d’euros par an qui représente un déficit pour les caisses de l’Etat de 15 MMDS.




La bonne nouvelle pour l’économie marocaine est la levée des droits de douane sur les marchandises en provenance d’Europe, notamment l’Espagne, premier fournisseur en produits de consommation de tous genres. Pourtant selon une  enquête réalisé par le ministère espagnol du commerce, la suppression tarifaire en mars 2012, n’a eu aucun impact positif sur le commerce légal en réduisant ce que le gouvernement espagnol nomme le commerce atypique.  Entendons par là, la contrebande et l’économie parallèle qui fleurit entre Sebta et Melilla et les marchés marocains.

 En effet, selon les autorités espagnoles, de mars 2012 à mars 2013, la contrebande s’est amplifiée, notamment au niveau des produits laitiers, de biscuiterie, de fruits secs, produits d’entretien ménager, l’électronique et les produits vestimentaires.  Des chiffres corroborés par les autorités marocaines qui estiment que chaque Marocain dépense en moyenne 150 euros soit l’équivalent de 1700 dhs,  par an en produits de contrebande provenant de l’Espagne. Au total, le marché de la contrebande est évalué à quelque 1,2 milliard d’euros par an soit l’équivalent de 15 milliards dhs de marché parallèle qui ne profite pas aux caisses de l’Etat.   

Crise oblige

Si les chiffres ont éclaté ces derniers mois, il faut y voir l’impact de la crise économique sur la vie des résidents marocains en Espagne. Ces derniers, sans boulot, en proie au chômage qui a dépassé les 26 pour cent, se sont recyclés dans d’autres activités pour survivre. Mais ils ne sont  pas les seuls. Selon plusieurs ONG espagnoles, même des Espagnols ont trouvé dans la contrebande un terrain de jeu juteux en attendant le retour à la normale.  

A preuve, les allers-retours enregistrés au niveau des postes frontaliers de Tarajal à Sebta et Melilla. Mais aussi au niveau d’Algésiras ou des convois de voitures remplies de marchandises, prennent le chemin du Maroc pour écouler les produits à des prix défiant toute concurrence.  Selon les autorités douanières espagnoles, au niveau des frontières terrestres entre le Maroc et l’Espagne, le prélèvement à l’importation, équivalent à la TVA, a augmenté de 5% à Sebta et 9% à Melilla, en 2012. 

Depuis le début de l’année 2013, ce pourcentage a déjà augmenté de 18%, à Sebta. Pour les responsables de la Chambre de commerce, et la Confédération des chefs d’entreprise  à Sebta, « cette augmentation ne peut s’expliquer que d’une seule façon : l’augmentation des exportations « atypiques » vers le Maroc. » Le Conseil avance, par ailleurs, une  augmentation  de 25% depuis le début de l’année au niveau des deux villes occupées.

Marchés noirs
Ces produits acheminés de l’Espagne, on ne les retrouve pas uniquement dans des marchés comme Derb Ghallef, qui a, du reste, bâti sa réputation sur le coût réduit des produits proposés, mais partout, chez le buraliste du coin, dans les superettes, chez tous les détaillants. Cela va du chocolat au fromage en passant par le lait, les yogourts, les pates, le riz, le beurre, les limonades, le thé, le café, le sucre, les fruits secs, les conserves de tous types et même des produits surgelés. 

Les filières sont nombreuses qui acheminent des marchandises a des prix bas pour inonder le marché. Souvent au détriment de la qualité. Certaines grandes enseignes ont même tiré la sonnette d’alarme pour dénoncer des trafics au niveau des étiquetages et des dates d’expiration.

Reste que pour des centaines de milliers de Marocains le marché parallèle est la seule soupape économique pour survivre. Si certains ont fait fortune dans la contrebande, pour les adeptes du marché noir, il est question de faire face à la pauvreté en revendant des produits achetés bon marché à une clientèle dont le pouvoir d’achat est tout aussi précaire.

Aujourd’hui, d’autres régions approvisionnent le marché marocain en produits de Contrebande. Il s’agit de Gibraltar et des Iles Canaries où de grandes quantités de marchandises atterrissent dans les provinces du Sud. Sans oublier le trafic de médicaments et de gaz avec les Algériens de l’Est. En 2012, 70% de l’économie de la région du Maroc oriental dépend de la contrebande. 

Selon un récent rapport sur le commerce illicite, la Chambre de commerce, d’industrie et de services de Oujda,  le chiffre d’affaires moyen de cette activité est estimé à 6 milliards de dirhams par an. Le secteur informel emploie plus de 10 000 personnes et couvre l’essentiel des besoins de consommation», conclut le même rapport.



Encadré
3,3 milliards de cigarettes de contrebande vendues au Maroc

Si l’on en croit les chiffres émanant d’une étude réalisée par un cabinet privé sur le trafic des cigarettes au Maroc, 18 % de la consommation globale des cigarettes proviennent de la contrebande. Selon les spécialistes,  cela équivaut à 3,3 milliards de cigarettes consommées annuellement par les Marocains. Evidemment, cette consommation n’apporte pas le moindre denier au fisc marocain. Pour les autorités marocaines, les recettes fiscales du pays seraient lourdement affectées par le marché de la contrebande des cigarettes. Ce circuit illégal de distribution fait perdre à l’Etat pas moins de 3,3 MMDH par an.  Mais les dégâts de ce marché parallèle affectent aussi les débitants de tabac qui connaissent annuellement une perte de revenus estimée à 153 millions DH. Pour exemple, il faut citer le cas du phénomène de la marque de cigarettes «American Legend», qui est non seulement  non référencée au Bulletin Officiel dans la liste des produits autorisés à la vente sur le territoire marocain, mais qui est également  extrêmement nocive pour la santé des consommateurs. Pourtant, selon les autorités  marocaines, elle «représente plus de 34% des volumes vendus sur le marché de la contrebande». Ce qui revient à  plus de 1,2 milliard de cigarettes «American Legend» vendues chaque année sur le marché parallèle. Pire, l’expansion de ce marché noir de la cigarette affecte également les travailleurs marocains qui produisent du tabac.  Selon un communiqué de  Imperial Tobacco Maroc, «cette activité fait vivre plus de 3000 planteurs.» qui souffrent aujourd’hui d’une demande en baisse, à cause d’un marché inondé par  des produits de contrebande vendues à des prix très bas.

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