vendredi 8 mars 2013

«Ce qui est arrivé à M. Davison» de Jon McGregor


Jon McGregor signe un recueil de nouvelles à la fois dur et sans compromis sur le monde actuel. Dans cet opus, c’est une Angleterre abimée qui est donnée à voir.


L’étrange M. McGregor. Cet homme déroule les mots comme des couteaux qui émincent tout ce qui se qui se trouve sur leur chemin.  Rien ou presque ne trouve grâce à ses yeux dans une Angleterre disloquée. Le paysage d’abord. Des routes bétonnées où plus rien ne survit en dehors de la rutilante machinerie. Les fêlures des jours défilent dans un univers sans teintes. Et c’est là que l’écriture de Jon McGregor devient jubilatoire.

Des textes très courts, parfois une seule page suffit pour créer un monde avec ses folies, ses déboires, ses attentes avortées. On passe tour à tour, d’une poésie moderne où l’on côtoie quelques sphères insoupçonnées à des passages ultra modernes, lourds, parfois maladroits, mais qui équilibrent le récit. Mais le maître mot ici demeure la précision. McGregor écrit au hachoir. Il suit son idée dans ses confins et ne laisse rien échapper à sa loupe pour rendre les atmosphères morbides, diaboliques, glaciales et mortelles.

Refuge et subterfuge

Pour McGregor, il n’est pas question de surfer sur cette vague moderne de livrer en série des épisodes de vie, facile et  digestes. Non, même en une seule phrase, le condensé est tel que l’on est pris de frayeur devant le destin étrange qui se dessine devant nous.  « Fils de fer », « On se fait signe… », « On faisait juste une ballade en voiture», il s’agit certes de pans de vie, mais ce sont les situations humaines qui marquent. 

Accident, nage dangereuse, catastrophe… le danger guette. Et c’est cette menace qui peut fondre de partout qui tient en haleine. On ne sort pas indemne de telles lectures. « En hiver le ciel », « Cherche vagin », L’œuf et la poule », d’autres dérives, d’autres glissades vers des abimes béants prêts à engloutir l’existence de tant de protagonistes qui semblent désarmés, non devant leur destin, mais une succession d’éléments qui définissent leurs parcours. 

Entre regrets, volonté certaine de bien faire sans y parvenir, l’implacable machinerie de la vie broie tout au passage. L’apocalypse dans sa terreur post-moderne est né sous la plume de Jon McGregor, il ne reste plus qu’à se trouver un refuge. Ou un subterfuge.




Editions Christian Bourgois. 

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