vendredi 22 mars 2013

A propos du Kadhafi marocain de Derb Ghallef


Il y a des destinées posthumes. A défaut de faire une grande sortie par la grande porte ouverte de l’histoire, des figures du calibre de Moammar Kadhafi dont on connaît l’humiliante fin, peuvent au moins se payer  quelques instants de résurrection. Au Maroc, un type ressemblant à s'y méprendre à Kadhafi a été aperçu en train de faire ses courses dans une épicerie.

Le bonhomme a cultivé la ressemblance jusqu’à devenir le sosie du dictateur libyen. Mieux. Il s’est même prêté au jeu de la célébrité en acceptant   les flashs des badauds et autres curieux, très amoureux du  Colonel.  Si ceci n’est pas l’immortalité, qu’est-ce que ceci peut-il bien être ?  Une photo posthume avec un assassiné, c’est du scoop. Pour certains, c’est même un message de l’au-delà. La sacralité passe par là. Surtout dans un monde où le sacré est en perte de vitesse. Malgré les slogans fanatiques et communautaristes.  

Certains ont même dans leur porte feuille, une photo du guide. Elle peut, dans certains cas siéger sur le même plastique que Ben Laden et Saddam. Trinité arabo-musulmane. Le fer de lance de la force des musulmans. Tous, selon une certaine rue arabe, sacrifiés sur l’autel de la barbarie occidentale.

C’est cette même idéologie très réconfortante et victimisante qui fait que des  jeunes veulent marcher dans les pas de leurs illustres prédécesseurs. Looks, attitudes, chevelure, démarches, gestes et effets de manches, il y en a même qui pousse le culte de la personnalité jusqu’à prénommer leur progéniture, Saddam, Oussama, Moubarak, Moammar… Non sans fierté.

La rue arabe manque d’idoles. A une époque où des incultes deviennent des exemples à suivre. A un moment de l’histoire où l’indigence intellectuelle définit l’échelle social, quand des petits s’habillent en grand et des malvenus dictent ce qu’il faut suivre comme tendance, normal que l’arabe lambda et partant le Marocain en mal de repères, s’accroche à l’image de criminels de guerre, de dictateur, de fous d’Allah comme effigie de ralliement des masses.

C’est ce que certains sociologues pourraient appeler la revanche par procuration des plus écrasés. Quand on massacre leurs idoles, ils les portent en bandoulière ou alors scotchent leurs portraits dans les toilettes. C’est cela et rien d’autre les destinées fatales.

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