mercredi 27 mars 2013

à tous ceux qui se délectent de la crise qui frappe l'Europe...


Le chauvinisme est une tare. Quand il est doublé de nationalisme primale, c’est un crime. Un ami, en qui j’ai toujours eu confiance -un homme de bon sens et de culture- est tombé de son piédestal hier. Il m’a sorti, tout de go, que « c’est tant mieux pour l’Espagne cette crise qui l’a mise à genoux. Désormais, ce sont les Espagnols qui vont se démerder des pateras pour franchir le Détroit de Gibraltar dans le sens inverse.» 

Et il ajoute, dans un élan de grande trouvaille qu’après les Espagnols, on verra les Portugais, les Italiens et les Français leur emboîter le pas pour venir « quémander des petits boulots au Maroc où la croissance économique n’est pas si mal que cela ».

D’abord, le climat des affaires au Maroc n’est pas au beau fixe. Loin s’en faut. Les turbulences sont multiples. Les intempéries vont se succéder. Et rien ne garantit que les chiffres de croissance avancées par plusieurs institutions nationales ne soient pas que de la poudre aux yeux. 

Il n’y a qu’à faire un tour dans le vrai Maroc, les quartiers périphériques, les zones populaires, les milieux ruraux, les petites bourgades, les patelins et autres douars, pour se rendre compte, que les Marocains ne sont pas mieux lotis que les Grecs. J’irai même jusqu’à affirmer que les Grecs se portent encore mieux que des millions de Marocains.

Ensuite, l’idée selon laquelle les Espagnols vont affluer en grand nombre par Sebta et Melilla est fausse. Si certains cadres ont trouvé des jobs à Casablanca ou à Rabat, ce n’est que du provisoire en attendant que la situation s’arrange du côté de Madrid. Mais les maçons, les peintres en bâtiment, les menuisiers, les éleveurs, les petits cadres et les saisonniers ne vont pas investir Ktama et ces champs. 

Non. Ce sont d’abord les Marocains immigrés en Espagne qui vont rentrer au bercail. Ils vont laisser la place aux autochtones qui sont dans l’obligation d’accepter n’importe quoi pour ne pas sauter par une fenêtre quand les huissiers débarquent pour les expulser de leurs domiciles, acquis à crédit.

Non, mon ami, les pateras, ce n’est que dans un sens. Pour le moment et jusqu’à nouvel ordre mondial, une fatalité. Pedro et Jaime ne vont pas être rejetés sur les rives de Ksar Sghir. C’est la triste réalité que ni le chauvinisme de bas étage, ni le nationalisme à deux sous ne vont changer.  

Se refuser à voir certaines dures réalités ne les empêche pas de s’enraciner davantage dans le corps du pays. Je préfère être celui qui a ouvert les yeux, qui veut voir la crasse là où elle s’amoncelle que de vivre par succédanés illusoires pour épargner sa bien-pensance et se sentir confortable dans son politiquement correct. 

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