Jean-Charles Brisard,
consultant international, spécialiste du terrorisme et de son financement,
analyse avec nous le dernier coup de filet au nord du Maroc du réseau de
recrutement des jihadistes en Syrie et des menaces terroristes pesant sur le
Maroc en liaison avec les menaces d’Ami.
Abdelhak Najib : Quelle lecture
faites-vous du démantèlement à
Fnideq et à Sebta du réseau de recrutement pour le jihad en Syrie ?
J.C. Brisard : Vu l’actualité dans la région et les
menaces grandissantes d’Aqmi, on s’y attendait. Il ne faut pas oublier que le
Maroc a été directement visé par les communiquées des chefs terroristes au
Sahel. Et à travers le Maroc, les intérêts de pays comme la France et
l’Espagne.
Historiquement, les réseaux terroristes marocains ont
toujours été très liés aux cellules espagnoles. Depuis les années 1990,
on a remarqué, lors de nombreuses grandes opérations que les activistes
marocains et espagnols travaillent ensemble. Ce n’est pas étonnant de voir
aujourd’hui que ce réseau ait des bases au Nord du royaume et en Espagne.
Abdelhak Najib :
S’agit-il de groupes affiliés à Al Qaïda ou des cellules autonomes ?
J.C. Brisard : Les choses ont changé depuis 10 ans en
ce qui concerne le terrorisme et ces modes de fonctionnement. Le Maroc, tout comme d’autres régions
dans le monde et surtout au Maghreb et dans le Sahel, fait désormais face à des menaces qui ne sont plus aussi
prévisibles qu’elles l’étaient dans le passé. Il est question aujourd’hui d’une menace protéiforme. Elle peut provenir d’individus qui n’ont qu’un
lien distant, avec Al-Qaïda. Ces réseaux se greffent sur la bannière d’Al Qaida
pour donner une résonnance à leurs actions.
Abdelhak Najib : C’est
un coup de filet qui a été mené conjointement entre les services marocains et
espagnols. Quel est le poids réel de la lutte marocaine contre le
terrorisme ?
J.C. Brisard : Le Maroc a démontré depuis presque deux décennies que son travail
dans la lutte contre le terrorisme est efficace. Cela a donné d’excellents
résultats. Et les chiffres sont là pour le confirmer. Vous savez, le Maroc a
démantelé pas moins de 113 cellules dormantes en 10 ans. Ce sont autant
d’attentats déjoués. De fait la coopération avec la France et l’Espagne et
d’autres pays comme les USA a toujours été un atout autant pour Rabat que pour
les autres capitales. Ceci dit, on regrette l’absence de coopération
institutionnelle avec les pays voisins, dans la gestion des menaces et des réseaux
transnationaux.
Vous parlez
des pays maghrébins et ceux du Sahel ?
Tout à fait. J’ai regretté que la grande expérience du
Maroc dans la lutte contre le terrorisme n’ait pas été davantage entendue lors de
l’offensive contre les groupes islamistes et terroristes au Mali. Face,
notamment, aux faiblesses de la Tunisie, le Maroc doit devenir un élément
régional important dans la lutte contre le terrorisme.
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