La capitale économique du Maroc est un concentré de tous les maux qui
frappent les grandes villes du pays. Entre crimes, misère, chômage et anarchie,
il ne fait pas bon vivre à Casablanca.
Criminalité galopante
En effet, les
chiffres de la criminalité à Casablanca sont éloquents. Ils rendent compte de la
dangerosité d’une ville qui échappe à tout contrôle. Rien qu’en août 2012, lors d’un vaste coup de filet à
Casablanca, 2338 délinquants présumés ont été arrêtés. Parmi eux, 1849 ont été pris
en flagrant délit. Selon la police
nationale, ce tour de vis visait
plusieurs bandes criminelles qui sévissaient dans le périmètre urbain de la
capitale économique du pays. Parmi
les personnes arrêtées, 489 étaient recherchées par la police. Dans le tas, 1684
personnes avaient été interpellées puis relâchées après examen de leur cas. Et
c’est toujours les mêmes chefs d’inculpation qui sont retenus par les services
de police. Le vol est l’activité criminelle la plus florissante dans les plus
grandes villes du Maroc. 263 personnes
ont été arrêtées pour vols, dans 148 en flagrant délit. Quinze bandes qui commettaient
des vols dans les résidences, les sociétés, les commerces et autres dépôts ont
été démantelées et déférées devant le parquet sans oublier le trafic des
drogues qui a donné lieu en
l’espace d’une semaine à quelque
222 arrestations.
Marché ouvert
Les drogues font
recette dans une ville où la jeunesse n’a d’autre occupation que l’oisiveté.
Entre Hettistes et zonards, Casablanca est un marché de toutes les drogues.
Cannabis, cocaïne, Héroïne, ecstasy, psychotropes de tous genres. Chaque jour,
des centaines de personnes sont arrêtées. Et la prison d’Oukacha compte un
grand nombre de jeunes condamnés pour trafic de drogues. L’atmosphère est
claire : sous l’effet des drogues, les crimes sont plus récurrents et plus
aisés. D’ailleurs, tous les spécialistes du vol à l’arraché opèrent sous
anxiolytiques pour combattre leur peur. Cela, dans certains cas, a même conduit à des meurtres, pour des
broutilles : un sac à main ou une gourmette en or.
Le fléau affiche
ses victimes dans toutes les places et grandes artères de la ville. Enfants
marchant en bandes, ceux que l’on appelait les enfants des rues, sont
aujourd’hui plus nombreux, plus aguerris, et n’hésitent pas à rejoindre les
bandes criminelles qui leur apportent travail et protection… jusqu’au jour où
la case prison appelle.
Jungle en béton
Mais Casablanca
n’est pas uniquement une ville dangereuse parce que le crime y a élu domicile
depuis longtemps. Non, la métropole est devenue, au fil des années, une ville
hybride. Démographie effrénée, exode rural, extensions dans les périphéries, il
faut bétonner à tous prix. La cité
a fini par ressembler à une jungle inhospitalière de béton. Les spéculations
immobilières ont eu raison des dernières parcelles vertes de la ville. Plus un
seul poumon qui servirait de soupape pour les habitants. Ajoutez à cela, les
pollutions de tous genres, et vous avez un cocktail Molotov qui décime à tour
de bras. Maladies chroniques, allergies, asthmes, complications pulmonaires,
les médecins marocains ont, à chaque fois, sonné l’alarme. Mais que
faire ? La ville a dépassé
les autorités. D’ailleurs, Casablanca est la seule ville du Maroc qui compte le
plus grand nombre de crises au sein de son Conseil de la ville, autour de son
maire, Mohamed Sajid (lisez l’article de Aissa Amourag, pages…). Les guerres
intestines du pouvoir entre élus locaux passent avant les intérêts des
citoyens. Ce qui explique la saleté qui ravage la ville, dans tous les
quartiers. De Anfa supérieure à Sidi Moumen, pas un seul derb qui ne présente
son lot de sacs poubelles éventrés, sur les grands boulevards, dans les
ruelles, devant les commerces, sur la chaussée. C’est devenu presque une
habitude. Les Casablancais ont pris leur mal en patience et font avec, faute
d’être une priorité pour leurs élus.
Chantiers bâclés
Le visage que
montrait cette ville, jadis, un joyau Art Déco, au temps des Français, est
triste, moche et horrible, aujourd’hui. Alors, les responsables de la ville
lancent des projets d’embellissement. Toutes ses opérations de lifting
s’avèrent un ratage. D’abord l’exemple flagrant de la corniche à Ain Diab. Un
projet de grande envergure dont les habitants de la ville attendaient des
miracles. Il a accouché d’un ravalement de façade bâclé. Les boules qui ont
coûté aux contribuables la bagatelle de 10 000 dhs pièce, sont déjà rouillées. Les palmiers sont
morts-nés. Une fois posés à cette
hauteur vertigineuse, ils n’avaient aucune chance de survivre, sauf pour certains. Les balustrades sont
bouffées par l’air marin parce qu’on n’a pas pensé que construire et aménager
en bord de mer requiert des matériaux spéciaux pour que le bois, le fer et les
murs ne soient pas atteints par le sel marin. Quant aux petits jardinets, c’est
un danger. Les fils d’arrosage sont
toujours apparents aux côtés des fils électriques et les contours métalliques,
censés protéger les jardins, ont disparu. En ce qui concerne la fameux marbre
tant vanté, il a changé de couleur. Sale, triste, il fait de la Corniche,
désignée pour être la ballade de la ville, un coin quelconque où des milliards
ont été dépensés alors que les Marocains n’ont hérité que d’un chantier livré
avant sa fin.
Ceci s’ajoute à
d’autres ratages comme le boulevard d’Anfa que l’on a élargi en rasant de
magnifiques arbres. Idem pour les artères empruntées par le circuit du Tramway,
rien n’est achevé. De Mohamed V à Abdelmoumen en passant par Hassan II, Yacoub
El Mansour ou encore cité Plateau, on trouve encore des déblais, des fils non
raccordés, des jardinets non finalisés, des plantes mortes. Travail à la
va-vite ou non considération pour
les Marocains ? Reste que c’est rare qu’un projet publics dans cette ville
soit livré, clefs en main, dans les règles de l’art, sans qu’il y ait encore
des choses à arranger, des trous à boucher…
Absence de culture
Normal qu’une
ville aussi hybride et livrée à elle-même soit un centre sans le moindre
rayonnement culturel. Exceptés
quelques galeries d’art et les centres culturels étrangers, pas le
moindre musée, pas la moindre grande bibliothèque, érigés par la ville pour les
habitants de la cité. Béton, cafés, téléboutiques et les bruits des klaxons en
guise de concerts urbains. Les jeunes n’ont pas le choix. Les loisirs, ce n’est pas dans des
complexes sportifs aménagés qu’on va les vivre. Mais dans une crémerie, dos
contre le mur dans les quartiers ou sur des deux roues battant le macadam à la
recherche d’un portable à subtiliser.
Casablanca, la
capitale économique du Maroc est une ville misérable. Une cité d’immenses
disparités sociales. Une agglomération dangereuse qui nécessite d’urgence un
plan Marshall pour la sauver. Sinon, il gangrènera d’autres villes, déjà
lancées à brides abattues sur la même voie de déclin et de déchéance.
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