Le roi d'Espagne, Juan Carlos, effectue une visite
officielle au Maroc du 15 au 17 juillet 2013. Il est reçu par le roi Mohammed
VI avec à l’ordre du jour de nombreux dossiers importants : la sécurité,
l’immigration clandestine et les renforcement des relations économiques.
L’Espagne
se résout à l’évidence de la proximité géographique comme point de départ d’un
regain de stabilité économique. Que l’on ne s’y trompe pas, la visite
qu’effectue le roi Juan Carlos au Maroc du 15 au 17 juillet 2013 est purement
une escale d’affaires. Le souverain ibérique joue la carte des excellents
rapports qui le lie au roi Mohammed VI pour relancer une économie espagnole
moribonde. Taux de chômage qui a dépassé les 30%, croissance économique en
berne, dette souveraine au plus mauvais point et des crises dans tous les
secteurs clefs de l’économie espagnole. Tourisme, textile, bâtiment, services,
agriculture…, l’Espagne doit trouver des soupapes de secours pour respirer. Les
prévisions annoncent une année 2014 tout aussi dure. Ce qui explique les propos
dithyrambiques des officiels espagnols à l’image des déclarations le 4 juillet
2013 du ministre espagnol des Affaires étrangères José Manuel Margalo ,
pour qui «Le Maroc, en plus d’être notre voisin le plus proche, le Maroc est un
partenaire indispensable de l’Espagne. Il figure parmi les pays prioritaires
dans la politique extérieure espagnole».
Realpolitik
Les
impératifs économiques sont prioritaires lors de cette visite. Le Roi Juan
Carlos est accompagné d’une forte délégation d’hommes d’affaires. Les entrepreneurs espagnols ciblent des secteurs porteurs au Maroc
pour donner du champ aux entreprises espagnoles, dans le rouge depuis plus de 4
ans. Dans ce sens, le chef du patronat espagnol, Juan Rossel, a insisté lors de l’annonce officielle à Madrid
de la visite du souverain espagnol au Maroc, sur l'importance de ce voyage «particulièrement
pour les petites et moyennes entreprises espagnoles ayant des intérêts au
Maroc, mais aussi pour les sociétés marocaines établies en Espagne.» Cette
visite de trois jours est donc marquée par la signature d'accords de
coopération entre la CEOE et la Confédération générale des entreprises du Maroc
(CGEM). Pour le patronnât
espagnol, le Maroc une priorité régionale tant le marché marocain est porteur
de projets. C’est un marché économique considérable,
hors la zone euro, derrière les Etats-Unis mais devant la Chine. Il est surtout
une porte d’entrée vers d’autres pays africains où Rabat a déjà placé de
nombreuses antennes dans des domaines aussi divers qu’alléchants pour les
entrepreneurs espagnols. Les chiffres sont là pour donner le pouls d’une
offensive espagnole au Maroc. En 2012, les exportations espagnoles vers le
Maroc ont progressé de près de 30%. Plus de 1000 entreprises espagnoles évoluent
dans plusieurs secteurs stratégiques de l’économie nationale: BTP, tourisme,
textile, pêche et énergie.
Impératifs sécuritaires
On l’aura compris, autant Rabat que
Madrid évitent les sujets qui fâchent. Sebta, Melilla et les autres îles
occupées par l’Espagne ne font partie des débats. Par contre, la lutte contre
le terrorisme et l’immigration clandestine sont des sujets chauds sur lesquels
il faut constamment travailler. Une coopération efficiente. Là aussi les
chiffres sont probants, des dizaines d’attentats ont été déjoués dans les deux
pays et plusieurs dizaines de cellules dormantes ont démantelées grâce à la
complicité des services marocains et espagnols. Une collaboration qui remonte
aux années 90, mais qui a été élargie et approfondie après le 11 septembre et
surtout les attaques de Casablanca en 2003 et Madrid en 2004. Cette vision stratégique commune quant à la lutte contre le
terrorisme est aujourd’hui un exemple en Europe. Ce qui explique l’engagement
de Rabat au près de Bruxelles pour informer sur les réseaux essaimés en Europe,
comme le dernier coup de filet spectaculaire qui a neutralisé une grosse
structure de recrutement des jihadistes pour la Syrie opérant à partir de
Sebta. C’est dans cet esprit qu’il faut comprendre l’engament de trois
capitales européennes (Madrid, Paris, Lisbonne) aux côtés de Rabat pour serrer
l’étau autour des groupes terroristes qui officient dans le Sahel et le
Maghreb.
Vente d’armes
On ne peut parler de sécurité sans
parler de coopération militaire entre Rabat et Madrid. En effet, les deux
armées se connaissent bien. Elles participent toutes les deux à des exercices
militaires conjoints tant naval, marin que terrestre. Cette coopération étroite
est appelée aujourd'hui à croître avec des contrats d'armement, des formations
d'officiers et des opérations communes au sein de corps de maintien de la paix
soit en Afrique ou ailleurs dans des zones de conflits. Sans oublier que le Maroc demeure un
très bon client pour l’industrie de l’armement espagnole. Un rapport du ministère espagnol du commerce montre
que les livraisons d’armes espagnoles au Maroc ont augmenté en 2012 de prés de 86.6% en valeur par rapport à l’année 2011, passant de 1.5 millions d’euros en 2011, à 2.8 millions d’euros
en 2012. En avril 2013, le ministre espagnol de la Défense, Pedro Morenés, avait
reçu le ministre délégué auprès du chef de Gouvernement chargé de
l'Administration de la Défense nationale, Abdeltif Loudyi, en visite en
Espagne, pour justement établir les bases du renforcement de la coopération
bilatérale.
Immigration clandestine
Quant au volet de l'immigration clandestine, après plusieurs tensions avec Madrid, un
compromis a été trouvé. Le Maroc
traite désormais directement avec l'Union Européenne pour juguler un problème
régional de taille. Entre Rabat et Bruxelles, tout porte à croire que l'on
s'achemine vers la signature d'un accord de réadmission pour les immigrés en
situation irrégulière. Dans cette
optique, le Maroc a déjà pris ses marques comme un allié stratégique pour
l'Europe. Un hub économique vers l'Afrique et un allié sécuritaire de taille
dans la lutte contre les menaces terroristes venues du Sahel.
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