vendredi 12 juillet 2013

Visite du roi Juan Carlos au Maroc: Madrid mise sur Rabat


Le roi d'Espagne, Juan Carlos, effectue une visite officielle au Maroc du 15 au 17 juillet 2013. Il est reçu par le roi Mohammed VI avec à l’ordre du jour de nombreux dossiers importants : la sécurité, l’immigration clandestine et les renforcement des relations économiques.




L’Espagne se résout à l’évidence de la proximité géographique comme point de départ d’un regain de stabilité économique. Que l’on ne s’y trompe pas, la visite qu’effectue le roi Juan Carlos au Maroc du 15 au 17 juillet 2013 est purement une escale d’affaires. Le souverain ibérique joue la carte des excellents rapports qui le lie au roi Mohammed VI pour relancer une économie espagnole moribonde. Taux de chômage qui a dépassé les 30%, croissance économique en berne, dette souveraine au plus mauvais point et des crises dans tous les secteurs clefs de l’économie espagnole. Tourisme, textile, bâtiment, services, agriculture…, l’Espagne doit trouver des soupapes de secours pour respirer. Les prévisions annoncent une année 2014 tout aussi dure. Ce qui explique les propos dithyrambiques des officiels espagnols à l’image des déclarations le 4 juillet 2013 du ministre espagnol des Affaires étrangères José Manuel Margalo , pour qui  «Le Maroc, en plus d’être notre voisin le plus proche, le Maroc est un partenaire indispensable de l’Espagne. Il figure parmi les pays prioritaires dans la politique extérieure espagnole».


Realpolitik

Les impératifs économiques sont prioritaires lors de cette visite. Le Roi Juan Carlos est accompagné d’une forte délégation d’hommes d’affaires. Les entrepreneurs espagnols ciblent des secteurs porteurs au Maroc pour donner du champ aux entreprises espagnoles, dans le rouge depuis plus de 4 ans. Dans ce sens, le chef du patronat espagnol,  Juan Rossel, a insisté lors de l’annonce officielle à Madrid de la visite du souverain espagnol au Maroc, sur l'importance de ce voyage «particulièrement pour les petites et moyennes entreprises espagnoles ayant des intérêts au Maroc, mais aussi pour les sociétés marocaines établies en Espagne.» Cette visite de trois jours est donc marquée par la signature d'accords de coopération entre la CEOE et la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM).  Pour le patronnât espagnol, le Maroc une priorité régionale tant le marché marocain est porteur de projets. C’est un marché économique considérable, hors la zone euro, derrière les Etats-Unis mais devant la Chine. Il est surtout une porte d’entrée vers d’autres pays africains où Rabat a déjà placé de nombreuses antennes dans des domaines aussi divers qu’alléchants pour les entrepreneurs espagnols. Les chiffres sont là pour donner le pouls d’une offensive espagnole au Maroc. En 2012, les exportations espagnoles vers le Maroc ont progressé de près de 30%. Plus de 1000 entreprises espagnoles évoluent dans plusieurs secteurs stratégiques de l’économie nationale: BTP, tourisme, textile, pêche et énergie.

Impératifs sécuritaires

On l’aura compris, autant Rabat que Madrid évitent les sujets qui fâchent. Sebta, Melilla et les autres îles occupées par l’Espagne ne font partie des débats. Par contre, la lutte contre le terrorisme et l’immigration clandestine sont des sujets chauds sur lesquels il faut constamment travailler. Une coopération efficiente. Là aussi les chiffres sont probants, des dizaines d’attentats ont été déjoués dans les deux pays et plusieurs dizaines de cellules dormantes ont démantelées grâce à la complicité des services marocains et espagnols. Une collaboration qui remonte aux années 90, mais qui a été élargie et approfondie après le 11 septembre et surtout les attaques de Casablanca en 2003 et Madrid en 2004.  Cette  vision stratégique commune quant à la lutte contre le terrorisme est aujourd’hui un exemple en Europe. Ce qui explique l’engagement de Rabat au près de Bruxelles pour informer sur les réseaux essaimés en Europe, comme le dernier coup de filet spectaculaire qui a neutralisé une grosse structure de recrutement des jihadistes pour la Syrie opérant à partir de Sebta. C’est dans cet esprit qu’il faut comprendre l’engament de trois capitales européennes (Madrid, Paris, Lisbonne) aux côtés de Rabat pour serrer l’étau autour des groupes terroristes qui officient dans le Sahel et le Maghreb. 
Vente d’armes
On ne peut parler de sécurité sans parler de coopération militaire entre Rabat et Madrid. En effet, les deux armées se connaissent bien. Elles participent toutes les deux à des exercices militaires conjoints tant naval, marin que terrestre. Cette coopération étroite est appelée aujourd'hui à croître avec des contrats d'armement, des formations d'officiers et des opérations communes au sein de corps de maintien de la paix soit en Afrique ou ailleurs dans des zones de conflits.  Sans oublier que le Maroc demeure un très bon client pour l’industrie de l’armement espagnole. Un rapport du ministère espagnol du commerce montre que les livraisons d’armes espagnoles au Maroc ont augmenté en 2012 de prés de 86.6% en valeur par rapport à l’année 2011, passant de 1.5 millions d’euros en 2011, à 2.8 millions d’euros en 2012. En avril 2013, le ministre espagnol de la Défense, Pedro Morenés, avait reçu le ministre délégué auprès du chef de Gouvernement chargé de l'Administration de la Défense nationale, Abdeltif Loudyi, en visite en Espagne, pour justement établir les bases du renforcement de la coopération bilatérale.
Immigration clandestine
Quant  au volet de l'immigration clandestine,  après plusieurs tensions avec Madrid, un compromis a été trouvé.  Le Maroc traite désormais directement avec l'Union Européenne pour juguler un problème régional de taille. Entre Rabat et Bruxelles, tout porte à croire que l'on s'achemine vers la signature d'un accord de réadmission pour les immigrés en situation irrégulière.  Dans cette optique, le Maroc a déjà pris ses marques comme un allié stratégique pour l'Europe. Un hub économique vers l'Afrique et un allié sécuritaire de taille dans la lutte contre les menaces terroristes venues du Sahel.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire