Le réalisateur québécois
Denis Villeneuve signe l’un des films les plus puissants de ces dernières
années. Un thriller d’un type nouveau avec Hugh Jackman et Jack Gyllenhaal.
Est-ce
un indice quand un grand réalisateur de films noirs, voire d’horreur, comme
William Friedkin, se met à encenser un film sur son compte Tweeter ? A
voir le film, on souscrit à tout ce que dit le metteur en signe de « L’exorciste ».
Pour cette histoire nichée dans une
banlieue bostonienne des plus froides et sans âme, c’est le destin d’un
flic qui traque des kidnappeurs de deux jeunes gamines et un père qui devient
fou tant la douleur est intenable. Les deux hommes se perdent dans une enquête
terrible, écrite et surtout filmée comme un immense labyrinthe inextricable
duquel, il est presque impossible de s’en sortir. Le mot labyrinthe n’est pas
ici une parabole. Il y a certes l’enquête tortueuse, mais de vrais dessins sous
forme de labyrinthe qu’il faudra comprendre, résoudre pour avancer un tantinet
dans cette chasse à l’homme, plus improbable qu’effrayante.
Film
américain signé par un Canadien, il y a cette vision du western dans toute sa
beauté qui affleure, doublé du drame urbain qui se joue en huis clos, façon
Eastwood dans « Mystic River » ou encore Ben Affleck dans le sublime
« Gone Baby Gone ». Mais il y a ce trait de génie chez Denis
Villeneuve qui rend toutes ces atmosphères dans un récit écrit avec brio.
Angoisse et souffrance
La
nature, les atmosphères ont ici un rôle capital. C’est un personnage à part
entière qui vient donner la réplique au père et au flic. Pluie incessante, ciel
couvert, froid de plus en plus mordant, Boston devient la ville de la
souffrance. Tout est y pesant. On sent les protagonistes rapetisser sous l’écrasement
de ce rouleau compresseur qui donne encore plus de tension à une course folle
d’une semaine, de puzzle en puzzle pour sauver deux vies innocentes. Dénis
Villeneuve le souligne dans ces mots : On a essayé de reproduire
cette qualité « argentée » dans la lumière. Les nuits sont plus lyriques, plus
radicales : il fallait qu’on sente le combat de la lumière pour percer les
ténèbres. On voulait créer un sentiment de claustrophobie. Dehors comme à
l’intérieur, avec des personnages contraints de traverser un cadre, de passer des
portes…».
Grand
cinéma
Le rendu est sublime à tous les points de vue.
Evidemment l’angoisse grandit. L’horreur prend de plus en plus corps. Et les
deux hommes comme les deux fillettes restent en suspens. C’est cette lévitation
comme pris dans une tornade sans jamais pouvoir toucher terre, tout en restant
conscient du vertige, qui fait de « Prisoners », un des films les
plus forts du moment. Tout est centré sur la fragilité humaine. Les personnages
sont vulnérables , friables, perdus. Ils ne sont pas des héros. Ils ne sont pas
non plus des anti-héros. Juste des gens que la vie malmène. C’est là que réside
la justesse du traiteme,t de Denis Villeneuve qui a travaillé sur un scénario,
écrit par un autre, mais auquel il a apporté juste ce qu’il faut pour rendre
plus tendu un scénario bien ficelé : «En lisant le scénario, la tension et
le suspense étaient déjà là, je n’avais pour ainsi dire qu’à suivre le
découpage. Mon travail a surtout consisté à prendre soin des personnages, à me
rapprocher de leur vulnérabilité, de leur conflit moral intérieur.» précise le
réalisateur du film.
Réalisé
par Denis Villeneuve. Avec Hugh Jackman et Jack Gyllenhaal.
Actuellement
en salles au Maroc.
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