La 1ère Campagne de sensibilisation à la situation des personnes
âgées a été lancée, le 1er octobre 2013 à Rabat, par la ministre de
la Solidarité, de la femme, de la famille et du développement social, Bassima
Hakkaoui, à l'occasion de la Journée internationale des personnes âgées.
Mieux vaut
tard que jamais. Enfin une action en faveur des personnes âgées au Maroc. Une
initiative qui relève du cérémonial
festif à l’occasion d’une date célébrée mondialement par tous ?
Ou est-ce un réel éveil moral, à
la fois réfléchi et tangible, pour s’occuper de la situation très précaire de
plus de 3 millions de « vieux » qui vivotent, survivent tant
mal que bien, en attendant la gueuse ?
Pour les
ministres présents à Rabat lors du lancement de cette campagne de sensibilisation à la situation des
personnes âgées, le 1er octobre 2013, les choses semblent, au moins
en apparence, sérieuses. Autour de la ministre de la famille et de la
solidarité, Bassima Hakkaoui, qui prend u poil de la bête depuis la rentrée, on
trouve le ministre de la santé, Houssaine El Ouardi, dont le département est
appelé à faire des efforts monstres pour aider les « vieux « du
Maroc qui sont souvent la cible de graves maladies, sans prises en charge, ni
soins adaptés. On compte aussi le
ministre de la Jeunesse et des Sport, Mohamed Ouzzine, dont la présence dénote
dans cette fête gant le troisième voire le quatrième âge ne relève pas de ses
compétences ministérielles. Ce qui a fait dire à un médecin
casablancais que «peut-être, on va demander aux personnes âgées de faire
du sport et de réussir là où les jeunes ont échoué ».
Trésor national
Une ironie
qui n’est pas de mauvais goût tant même les jeunes sont marginalisés, délaissés
et hors jeu dans l’équation gouvernementale, pas uniquement au niveau des
sports.
Quoi qu’il
en soit, le thème de cette campagne en dit long sur le fond des actions qui
devraient, logiquement suivre. «Les Personnes âgées, un Trésor dans chaque
foyer ». C’est là un fait,
mais en dehors de la famille, qui, traditionnellement, et malgré la course
effrénée de la modernité, veille encore sur ses «vieux», les pouvoirs publics
s’en sont lavés les mains, préférant adopter l’attitude de l’autruche face à un
réel problème de moralité et de santé publiques.
Pour Mme
Hakkaoui «cette campagne vise à sensibiliser à la promotion du rôle de la
famille et des acteurs dans la prise en charge des personnes âgées et
l'amélioration de leurs images au sien de la société conformément à nos valeurs
cultuels, culturelles et civilisationnels ». Pour arriver à de tels
objectifs, on va distribuer des flyers et des dépliants pour attirer l’attention
des uns et des autres. La télévision et la radio sont aussi mises à
contribution en mode multilingue.
Dans l’oubli
Au-delà du
papier glacé et des slogans, les familles se demandent comment,
« concrètement on va aider les personnes âgés ? Car, moi, je n’ai pas
attendu qu’onj me lance un dépliant pour prendre conscience que mes grands
parents souffrent de solitude, de fragilité et de maladie, et je pense que tous
les Marocains sont concernés à chaque instant par le sort des
leurs » ; assène, Nabila. B, une infirmière à Casablanca. Des
« vieux » elle en voit défiler tous les jours. « Ils ont traités
comme des moins que rien. On les oublie, on ne leur vient pas en aide » ajoute-t-elle,
dégoûtée par le sort réservé à des millions de personnes âgées dans un pays
« qui se dit musulman et où la solidarité surtout avec les plus âgés
devrait être un règle de conduite infaillible ».
En effet,
les personnes âgées représentent près de 3 millions de personnes au Maroc. Selon
l'enquête nationale réalisée par le Haut-Commissariat au Plan en 2010, ce
chiffre avoisine les 8,5 pc de la population marocaine. Pour la ministre de la
famille, ce pourcentage peut atteindre « les 11,1 pc d'ici 2020.» Les
réalités marocaine sont telles que la majorité des personnes âgées au Maroc vivent
au sein de leurs familles qui s’occupent de tout : soins médicaux,
déplacements, nourritures, habits…etc. Aucune aide de la part du gouvernement
n’est destinée à cette tranche de
la société. Et quand on sait « que les retraites quand il y en a sont
dérisoires, un vieux peut crever
de faim » précise, Jamal. D, un cadre de banque. Et qu’en est-il des 6 pc
de cette catégorie qui vit en dehors du noyau familial ? Comment
vit-elle ? Qui s’en charge ? Pourtant conformément aux dispositions
de la Constitution notamment l'article 34, «les pouvoirs publics élaborent et
mettent en oeuvre des politiques ( ) en vue de traiter et prévenir la
vulnérabilité de certaines catégories ( ) dont les personnes âgées». Si depuis
des décennies, les vieilles personnes ont été délaissées, au moins depuis deux
ans que la nouvelle constitution est en vigueur, les personnes âgées sont
toujours la cinquième roue du carrosse.
Mesures concrètes
Ce qui
fait dire au ministre de la santé, Houssaine El Ouardi que plusieurs mesures
ont été prises pour venir en aide aux personnes âgées. Ceci est même avancé
comme une priorité stratégique dans le cadre du plan du ministère de la Santé
(2012/2016). Bonne nouvelle. Avec des chiffres à l’appui. Dans ce sens,
apprend-on par le ministre de la santé que son département a « organisé
des sessions de formations au niveau régional au profit de 73 médecins
généralistes et 39 infirmiers dans le domaine de la gériatrie.» Pour plus de
trois millions de « vieux » on parle de 73 généralistes alors que
cette frange de la société souffre d’Alzheimer, Parkinson, maladies
cardiovasculaires, problèmes psychiatriques, des maladies sévères de reins,
suivent des dialyses…
Le
chapitre des maladies clos, il faut alors penser aux loisirs des « vieux »
et c’est là qu’entre en jeu le ministère des Sports. Mohamed Ouzzine a expliqué
lors de cette rencontre du 1er octobre que son département «va
permettre aux personnes âgées d'avoir accès aux programmes et activités pour le
temps libre en phase avec leurs besoins et attentes par le biais notamment de
la promotion et l'organisation des activités culturelles et sportives et la
facilitation d'accès au espaces et établissements relevant de ce département.»
C’est une très bonne chose si tout le reste allait bien. Mais on ne demande pas
à un vieux marocain de plus de 75 ans, malade, mal nourri, négligé par tous,
excepté par sa famille, qui se saigne pour lui garder un minimum de dignité,
d’aller faire du tennis ou assister à un matche de foot entre Widad et Raja. A
moins que le sport ne soit des parties de « ronda » dans la rue, pas
loin des feux rouges.
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