L'édition 2013 du Festival
international du film de Marrakech (FIFM) est, de l'avis de tous les
spécialistes, l'une des plus abouties. Grand jury autour de Martin Scorsese,
une compétition officielle avec de très grands films, venus du monde entier, et
des hommages pour des icônes absolues du 7ème art.
James Gray, le cinéaste américain
d'origine russo-polonaise, après sa Masterclass, donnée le 2 décembre 2013 au
Palais des Congrès de Marrakech, a bien résumé ce festival:" j'ai été
membre du jury en 2012, j'ai pu voir de grands films et découvrir des talents
immenses. cette année, il semble que la magie Martin Scorsese a opéré, mais je
mense que c'est une année mémorable". Comme quoi le chiffre 13 peut être
synonyme de grande réussite. Il faut dire que le jury de cette édition est des
plus relevés. Martin Scorsese, Marion Cotillard, Fatih Akin,Park Chan-wook,
Amat Escalante, Paolo Sorrentino… que des calibres XXL pour décortiquer chaque
oeuvre dans ces moindres recoins. Ils sont servis par une excellente sélection
pour la compétition officielle.
Grand cru
D'emblée, le premier film en lice
"The Wishful Thinkers", a donné le ton. Film espagnol, signé Jonas
Trueba, c'est un hymne pour le cinéma. Une superbe mise en abîme de tout le
process pour faire oeuvre cinématographique, avec des clins d'oie sublimes
comme ce passage en pleine séance de cinéma où le protagoniste quitte la salle,
va voir le projectionniste, le tout en cinéma muet. Film sobre, au plus près de
l'écriture avec ces aléa, ces changements, ces angles de vision, le tout en
noir et blanc, avec en prime une chanson sublime, tournée en clip surannée,
comme un hommage à tout ce qu'il y a de beau dans le cinéma. "Viva la
liberta" de Roberto Ando est dans le même esprit. Film fort, décliné avec
candeur, sur une affaire politique, pleine de rebondissement, avec au centre,
des questionnement sur la moralité, la philosophie et les enjeux
politoco-politiciens. Servi par
l'inégalable Toni Servillo, c'est un film de très bonne facture. Dans le même
sillage, il faut lire des oeuvres comme "Ida", "La marche",
"Medeas" qui a des allures très malickiennes, sur ce père de famille
qui cède au désespoir, devant le mutisme de femme, et se tue avec ses gosses dans sa voiture, asphyxiés
par la vie et la sécheresse de l'existence. d'autres films suivent cette courbe
qui se décline comme un roman tant les films en compétition sont liés entre eux
par un fil ténu qui en est l'ossature et en garantie l'homogénéité. "The
Gambler", "The Swimming Pool", "Traitors", "Bad
Hair", "Again" ou encore "Hotell" et "How I live
Now". Comme chaque année au festival du film de Marrakech, on fait place à
de véritables réflexions humaines sur la vie et ses corollaires. On donne dans
la profondeur et la créativité. Aucune place n'est laissée au faisage et aux
approximations pseudo-intellectuelles. C'est cela le pari gagnant de Bruno
Barde, le directeur artistique du FIFM.
Cinéma en fête
Si l'hommage rendu à Sharon
Stone, le 29 novembre 2013, a été une belle entrée en matière (voir interview
pagexxx), la suite a confirmé la tendance voulant faire de cette édition 2013
une grande réussite à tous les niveaux. D'abord la présence de Juliette Binoche
pour l'hommage qui lui a été rendu a fait vibré tout Marrakech. On savait cette
dame, pétrie de force et de profondeur, mais son attachement au Maroc, terre où
son père et son grand père ont vécu a donné à cette émouvante soirée une teinte
encore plus humaine. Le film d'Erik Poppe A Thousand Times Goodnight, présenté
hors compétition sur la vie d'une photographe de guerre, jouée avec maitrise
par Juliette Binoche, fait partie
des plus grands films de cette année. Ouvre compacte, dramatique, avec une
approche très critique sur les conflits dans le monde et le silence des grandes
puissances.
L'autre grand moment de ce
festival est l'hommage rendu aux cinémas scandinaves. Norvège, Danemark, Suède,
Finlande et Islande avec des noms comme Mads Mikkelsen, Bille August, Susanne
Bier, Thomas Vinterberg, Tobias Lindholm, Noomi Rapace et Nicolas Winding Refn
pour ne citer que ceux-ci, nous sommes face à ce qui se fait de mieux
aujourd'hui dans le monde du 7ème art. Cinéma innovant, héritier de Carl Dreyer, d'Ingmar Bergman,
influencé par les travaux d'un Aki Kaurismaki, Alf Sjoberg ou encore
l'inclassable Lars Van Trier.
Après des cinématographes comme la Corée du Sud, le Mexique, la France,
le cinéma indien, nous entrons de plein pied dans des univers particuliers,
transcendés par une approche du cinéma qui va à l'essentiel, se traduit dans la
vie de tous les jours, avec des libertés qui font pâlir les plus grandes
capitales du cinéma.
Label Maroc
Comme l'a dit, Martin Scorsese,
le vendredi 29 novembre lors de la cérémonie d'ouverture du festival de
Marrakech, le Maroc est une terre bénie, un pays d'accueil, ouvert sur le
monde. Un pays de paix où l'art tient une place de choix avec un festival de
renommée mondiale. C'est que
depuis la première édition, en 2001, le festival du film de Marrakech s'est
bâti autour de l'idée du partage et de l'ouverture vers toutes les cultures et
toutes les cinématographies. Un voeu royal, née d'une vision pour faire du
Maroc l'un des pays du Sud, un pays arabe, qui s'ouvre aux autres et qui reçoit
la beauté des différentes cultures dans un esprit de partage universel. Tout le
monde s'accorde à dire qu'avec le festival du film de Marrakech le pays a su se
placer comme l'une des destinations artistiques les plus courues depuis que des
figures comme Oliver Stone, Francis Ford Coppola, David Lynch, Leonardo Di
Caprio, Abel Ferrara, Jim Jarmush, James Gray et tant d'autres ont témoigné de
leur amour pour cette terre. C'est cela aussi la mission de ce festival, donner
une réelle image de ce qu'est le Maroc et quelles sont ses aspirations
profondes de pays résolument tourné vers l'avenir.
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