lundi 21 avril 2014

Interview de Faouzi Skalli, président du festival de la culture soufie de Fès

C’est la huitième édition du festival de la culture soufie de Fès. Un rendez-vous qui rend cette année hommage à Ibn Arabi. Faouzi Skalli, le directeur du festival nous éclaire sur les thématiques retenues et la particularité de cette édition.






Abdelhak Najib: Quelle est la particularité de cette huitième édition du festival de la culture soufie de Fès ?

Faouzi Skalli : Chaque édition est une nouvelle exploration de la culture Soufie considérée comme un patrimoine spirituel, intellectuel, artistique et social. Cette exploration est très souvent liée à une thématique et / ou à une personnalité. Par le passé nous avons par exemple évoqué des personnalités telles qu'Ibn Atâ Allah, Ibn Khaldûn ou , pour évoquer un personnage contemporain,  Mohammed Iqbâl.  L'édition de cette année est dédiée à une personnalité Soufie et un auteur qui occupe une place centrale dans toute l'histoire du Soufisme et dont l'œuvre  constitue sans doute l'élaboration la plus aboutie de sa doctrine,  Ibn Arabî.

Pourquoi avoir choisi de marche sur les pas d’Ibn arabi cette anéne ?

Faouzi Skalli : Outre la production d'une œuvre, d'une richesse et d'une profondeur sans équivalent, Ibn Arabî, a beaucoup voyagé de l'Andalousie d'où il est natif au Maghreb, et notamment à Fès où il a accompli plusieurs séjours, en Arabie, en Égypte, en Irak, en Syrie en Anatolie...Se mettre sur les pas d'Ibn Arabî c'est suivre un parcours émaillé d'enseignements, de rencontres, d'expériences spirituelles. C'est à la fois un parcours géographique qui nous renseigne sur la vie intellectuelle et spirituelle de l'époque et nous introduit incidemment dans différents milieux culturels,  sociaux, politiques, mais c'est aussi en soi la découverte d'un voyage initiatique  qui nous fait découvrir l'une des épopées les plus riches et les plus profondes de tous les temps. L'œuvre d'Ibn Arabî a eu une postérité immense jusqu'à nos jours. De nombreux travaux dans toutes les langues lui sont toujours consacrés. Cette édition sera l'occasion de rendre hommage à Souad al Hakim, ancienne rectrice de l'Université de Beirouth dont les travaux sur le lexique d'Ibn Arabî constituent une référence en la matière. 
Parlez-nous de la relation entre Ibn Arabî et Fès ?

Son séjour à Fès à plusieurs reprises et dont le souvenir est attaché à la Mosquée, aujourd’hui en réfection, d’al Azhar, au centre de la vieille Médina, nous montre tout l’intérêt que nous avons aujourd’hui à nous mettre sur les pas de ce guide spirituel pour comprendre le legs de l’une des pensées les plus fécondes et les plus essentielles de l’enseignement du soufisme et de la sagesse universelle.


Quelle place occupe le patrimoine soufie au Maroc ?

Faouzi Skalli : Le patrimoine culturel soufi est d'une très grande richesse, en particulier au Maroc dont l'histoire religieuse est inséparable de cette tradition et de cette culture spirituelle. Mais une question se pose à chaque nouvelle époque, comment intégrer ce patrimoine de valeurs, de sagesse et de spiritualité, mais aussi d'art, de poésie et de littérature de manière à ce qu'il puisse continuer à irriguer et féconder notre société et notre culture. Cette interrogation est l'objet même de ce Festival. Parallèlement à ce patrimoine immatériel il y a aussi  un certain nombre de zawiyyas, de sanctuaires, qui font parti de notre patrimoine historique et qu'il nous faut réhabiliter. L'un de ces lieux est le Masjid al Azhar, à Fès, dans le quartier de Ayn al Khayl, et qui est profondément lié à la mémoire d'Ibn Arabî. Ce lieu qui a fait l'objet d'une restauration par le Ministère des Affaires Islamiques doit aussi être  dédié  à un centre consacré à Ibn Arabî.

Comment peut-on aujourd’hui définir le soufisme ?
Le Soufisme est une voie d’enseignement et de « cheminement » spirituels qui s’inscrit au cœur de la tradition de l’Islam. Cette voie est aussi une expression de sa culture et, l’on pourrait dire, l’esprit même de sa Civilisation. En ce sens, le Soufisme qui est d’abord une expérience spirituelle, un « Dhawq » ou une saveur personnelle, a été ensuite tout le long de l’histoire, la source continue d’une créativité, intellectuelle, poétique, littéraire, artistique (en particulier musicale) et, d’une façon encore plus globale, bien qu’insuffisamment explorée, la source d’une productivité sociétale particulièrement riche et remarquable. C’est ce lien entre expérience spirituelle et la diversité des colorations de ses expressions culturelles et sociales, que le Festival de Fès de la Culture Soufie cherche à mettre en lumière et à décliner à travers la programmation de chacune de ses éditions.


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