samedi 11 juillet 2015

Abdelhak Najib et l’écriture romanesque

Par Noureddine Mhakkak, écrivain et journaliste 





Abdelhak Najib est un écrivain marocain de langue française, journaliste, critique d’art et présentateur d’une émission culturelle en langue arabe, L’écho de la création,  à la télévision marocaine (Al Oula), il vient de signer son roman « Les territoires de Dieu », à Carrefour des livres, le 3 juillet. Interview  


Vous venez de publier  un roman plein de la nostalgie, parlez nous de ce roman ?
Les Territoires de Dieu est un roman qui retrace une époque qui s’étale sur plus de quatre décennies. C’est un roman certes de souvenirs, de nostalgie, mais c’est aussi la chronique d’un quartier, en l’occurrence Hay Mohammadi, avec tout son poids historique, son référentiel culturel, son héritage politique… Ce roman, c’est surtout l’histoire de quatre enfants qui vont découvrir le monde, à travers les femmes, le sexe, les jouissances de la vie, dans ce qu’elles ont de plus pur, de plus naturel. Chacun fera son bout de chemin. Chacun trouvera une voie de salut, une manière propre à lui de s’en sortir dans un périmètre des territoires de Dieu, où la vie n’est pas un cadeau, mais un clavaire à ciel ouvert, un chemin de croix de tous les instants.  Mais c’est également une histoire de lutte, de combat, de refus, devant la fatalité, le destin préétabli et les manipulations quels que soient leurs origines, religieuse, politiques, idéologiques…

Quelle est la place du nouveau roman marocain écrit en langue française dans la littérature marocaine et francophone ?
Il y a aujourd’hui de nouveaux visages de la littérature marocaine d’expression française. Des auteurs qui ont chacun son approche de l’écriture, son univers et ses préoccupations littéraires et humaines. En ce qui me concerne, et je ne peux parler que de mon expérience, et il est claire. J’écris ma vie en arrière-fond et elle est un prétexte pour raconter d’autres existences humaines. Je pense que pour un écrivain aujourd’hui au Maroc, il faut une réelle coupure avec le folklore et la pseudo littérature pour touristes. On écrit parce qu’on a des choses à dire  sur son monde, ce que l’on vit, ce que l’on voit, sur son pays, ses semblables. On écrit parce qu’on a une certaine conscience de ce qui nous entoure et on y intervient pour le changer, le remodeler en créant d’autres univers parallèles.

Votre roman parle de la ville de Casablanca. Parlez-nous de votre relation personnelle avec cette ville …
Casablanca est une ville que j’aime et que je hais aussi. Ville à la fois riche de vie, mais hideuse, tentaculaire, sans histoire réelle, une ville bâtarde, une ville froide, sans âme, souvent toc et fausse. Chacun a évidemment son Casablanca. Celui que j’aime n’existe presque plus. J’aime un Casablanca Art Déco, aux beaux  bâtiments d’époque, aux hôtels particuliers  magnifiques, j’aime le Casablanca urbain, avec ses espaces verts qui ont disparu, ces belles salles de cinéma qui ont été rasées. J’aime le Casablanca populaire, avec de nombreux noyaux durs dans des quartiers mythique, mais tout cela a été dénaturé avec une démographie galopante et une vision urbaine sans queue ni tête.  Et j’aime la plage de cette ville, pourtant c’est l’une des rares villes côtière au monde avec de belles baies, qui a tourné le dos à la mer. C’est triste, mais c’est cela Casablanca, une matrone avachie, une garce, mais on n’est pas insensible à toutes ses aberrations et absurdités.

Vous êtes  romancier, critique d’art et présentateur d’une émission culturelle à la télévision marocaine, où vous vous trouvez mieux ?
Je suis d’abord journaliste avant d’être chroniquer et critique de cinéma et d’art. Mais je suis aussi un homme des médias. J’aime la télévision, j’aime le contact avec la caméra, les ambiances des plateaux lors des tournages pour  l’émission Sada Al Ibdae, qui bat des records d’audience. Mais j’aime aussi mon métier d’écrivain. Honnêtement, je suis à l’aise  partout et chaque discipline m’apporte une satisfaction particulière. J’ai dirigé des rédactions et même très jeune, j’ai travaillé avec de très bons patrons de presse, j’ai appris mon métier de journaliste sur le terrain, j’ai fait des reportages, des enquêtes sur le terrorisme, dans le couloir de la mort où j’ai fait le portrait de plusieurs dizaines de condamnés à mort, et cela restera pour moi de grands acquis pour ma carrière. Aujourd’hui, il y a la télévision et les romans, ce sont d’autres belles expériences qui approfondissent davantage ma vision du monde et mon contact avec les autres. Franchement, j’aime ce que je fais et  je le fais avec passion.

Quels sont vos projets culturels à venir ?
D’abord, il y a l’émission Sada Al Ibdae qui repart à la rentrée pour une autre saison. Toute l’équipe autour de Driss Idrissi, Raouf Sebbahi, Mohamed Chouika, Meriem Khalil et moi–même, a fait un très grand travail pour faire de cette émission un programme culturel phare, un Talk Show inédit, avec un réel concept, une vision et des tonalités différentes. Ensuite, j’ai un autre roman qui sort cette année, intitulé : « Le printemps des feuilles qui tombent », qui raconte la grande désillusion de ce que l’on a baptisé le Printemps arabe, et qui est pour moi, un hiver gelé, glacial, sibérien.  J’ai aussi mes  portraits dans le couloir de la mort qui sortent en deux tomes, intitulés : « Vivre dans le couloir de la mort ». Mais surtout un essai fourni et documenté sur le terrorisme sur lequel j’ai travaillé depuis 2001.  Sinon, j’ai des projets de films en tant qu’acteur, expérience que j’ai déjà vécue et que je suis tenté de reproduire.


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