Il suffit de mettre une
espèce de blouse de couleur fluorescente, pointer dans une rue, sur une artère
ou carrément sur un boulevard et accoster les usagers de la route. Tu
stationnes, il faut payer. Minimum 2 dhs. Maximum 10 dhs. Cela dépend des
endroits. C’est simple, à Ben J’dia, ils sont six gardiens de voitures dans un
petit périmètre qui va du cinéma Liberté à l’immeuble connu sous le nom de 17
étages. A côté du marché de Ben J’dia, du côté de la mosquée, il y a en a deux.
On les a suivi pendant 48 heures. But de la manœuvre, savoir comment ils
bossent, combien ils gagnent et quels horaires ont-ils. Gardien de voiture,
c’est un boulot très flexible. La seule
contrainte est d’être là. Sinon, le travail marche tout seul. Débrouille toi
pour trouver une place, gare-toi, fais ce que tu as à faire et revient allonger
les pièces sonnantes et trébuchantes. Très simple. « Mais je bosse durant
12 heures par jour », rétorque Brahim, un jeune de 22 ans, qui avoue se
faire pas moins de 300 dhs jour. « Oui, mais d’autres dans d’autres zones
peuvent se faire le double », insiste le jeune homme, qui aurait aimé
troquer sa place pour une autre à Anfa, Ain Diab, Massira El Khadra et d’autres
zones plus marchande, plus cossues.
La question que tout le monde
se pose est simple ? Qui sont ces gardiens. Ont-ils tous l’autorisation
d’exercer ce métier ? Non, ils n’ont pas tous le droit. Mais la réalité
fait que souvent, des jeunes s’improvisent gardiens. Seul un gardien qui porte un macaron est habilité
à vous demander de lui payer les 2 dhs en contrepartie de sa surveillance. Cela
veut dire que le bonhomme a l’autorisation d’exercer. Celle-ci est accompagnée
d’un badge qui permet à un automobiliste de reconnaître la légitimité du
gardien.
Avoir
le privilège d’être gardien est aussi accompagné par l’obligation de payer une redevance
annuelle que l’intéressé doit verser à la commune. La redevance en question est
calculée en fonction du nombre de voitures dans une zone définie. Le chiffre
varie entre 4 000 DH et 5 OOO par an en
moyenne. Ce qui nous fait une somme de 8 DH et 11 DH par jour. Quand on sait combien
peut empocher un gardien lambda, on se rend compte que c’est un business qui
peut être juteux. On comprend aussi aisément pourquoi, entre gardiens, c’est la
guerre des territoires. «Il y a des gens qui donnent des pots de vin pour avoir
leur badge, alors que des personnes connues dans le quartier, qui ont fait des
études, sans trouver du travail, doivent être prioritaires », affirme, un
jeune homme de 25 ans, qui réside à Derb Ghallef et regrette de ne pas avoir sa
chance de gardien.
Quoi
qu’il en soit pas tous les gardiens ne portent leur badge. Comment alors
démêler le bon grain de l’ivraie ? Difficile. D’où des rixes entre
automobilistes et gardiens. Souvent cela tourne à la bagarre. Et quand on a
affaire à des délinquants déguisés en
gardiens, cela peut être même dangereux. Il y a eu des cas d’agressions
enregistrées de la part de ces faux gardiens. Violence verbale qui peut virer à
l’agression physique pure et simple et souvent à l’égard des femmes. « Je
travaille, je fais mon boulot, quand on ne veut pas me payer, je dois bien
arracher mon dû», explique, calmement, un jeune de 19 ans, près de la gare
Casa-Port. Dans d’autres zones, plus populaire, à Hay Mohammadi, Derb Sultan,
Sbata, Ain Sebaa, Sidi Bernoussi, Hay Hassani, El Oulfa, c’est une manne. On
retrouve des repris de justice recyclés en gardiens, des drogués même. Comment
cela est-il possible ? « On
préfère qu’il gagne sa vie comme ça que d’aller vendre de la drogue ou agresser
les gens dans la rue », explique un responsable dans un arrondissement
dans l’ancienne médina.
Vrai ou faux gardien, badge
ou pas, quand on va acheter une parisienne dans une pâtisserie à 2 Mars ou sur le boulevard Al Qods, le temps de laisser
sa voiture durant deux minutes montre en main, il faut payer au moins 2 dhs au gardien improvisé. Pour une mioche
de pain qui vaut 1 dh 20, la course se chiffre à plus de 3 dhs. Et combien
d’arrêt peut-on faire par jour pour aller acheter telle ou telle autre
chose ? Faites le compte, on peut aisément débourser des dizaines de
dirhams au grand bonheur de ces as de la débrouillardise. Si ce métier offre
des débouchées à certaines personnes, il
est régi par une forme d’anarchie qui peut le rendre dangereux. Il est
grand temps pour les autorités locales de penser à des parkings dédiées aux
automobilistes, serrer les boulons au niveau des contrôles pour limiter
l’expansion des faux gardiens qui font du racket au détriment des citoyens.
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